Marx en quatrième ?

Gérard Lorigny

J’ai trouvé cela dans le bulletin du conseil général de l’Hérault du mois de septembre 2013, dans un article relatant l’insertion de Louise, une élève handicapée, dans le collège de Castelnau-Ie-Lez.

La rédactrice de l’article, Yolande Côté, a pu suivre l’élève dans sa classe et raconte ce qu’elle a vu et entendu.

“Aujourd’hui, Karl Marx et le communisme sont à l’étude (dans une classe de quatrième ! ). Lecture d’un extrait du Manifeste, échanges entre le professeur et les collégiens. Au mur, Karl Marx apparaît en projection. Que pensez-vous de ce personnage (car,bien sûr, tout le matérialisme dialectique se lit sur son visage – NDR) ? Plusieurs mains se lèvent. Yacine est invité à répondre : “Il a une barbe, donc il est juif ! ” Etonnement du professeur qui réajuste, stoppe la machine à clichés ! Margaux poursuit : “Il a de l’argent car il a pu se faire prendre en photo”. Marx prend forme avec les hypothèses des uns et des autres… (un juif plein aux as-NDLR). Que savez-vous du prolétariat ? Lucas, empressé de répondre, lève la main. Hésitations, puis : “Heu… m’en souviens plus…” Louise, elle, sait : “Prolétariat, ce sont les pauvres”... Le cours se termine, Karl Marx a été mis à sa juste place ».

Un petit juif plein aux as et préten­tieux qui s’occupe des pauvres ! De quoi se mêle-t-il ? Pauvre école, pauvres élèves ! Je ne sais pas si l’enseignante, Véronique Sizaret-Montbrun, a lu ce compte rendu de sa leçon et si elle en est satisfaite. Et le président du conseil général, M. André Vezinhet ?

Après Rimbaud, « le nabot sanglant » lejov homosexuel

Jean-Jacques Marie

Une certaine Najat Vallaud-Belkacern , ministre des Droits de la femme, a, dans une interview au magazine TêTu (d’octobre 2012) écrit les lignes aériennes suivantes :

« Aujourd’hui nos manuels (scolaires – NDA) s’obstinent à passer sous silence l’orientation LGBT (lesbiennes, gay, bi et trans) de certains personnages historiques ou auteurs même quand elle explique une grande partie de leur œuvre … ». Et, à l’appui de son affirmation, elle a cité Arthur Rimbaud, mais aucun personnage historique. Choisir Rimbaud pour illustrer l’idée que l’homosexualité expliquerait « une grande partie de son œuvre » prouve l’étendue de l’ignorance (ou de la stupidité ou des deux réunies) de la dame Najat Vallaud-Belkacem … qui a sans doute, comme beaucoup de lycéens et lycéennes, appris la brève aventure et le conflit violent entre Rimbaud et Verlaine dans un manuel scolaire.

A titre de personnage historique, puisqu’elle a omis d’en citer un, on pourrait lui suggérer de prendre l’exemple de Nicolas lejov, chef du NKVD de 1936 à 1938, arrêté en mars1939, et exécuté en mars 1940. Les enquêteurs de Béria, qui lui succéda, s’acharnèrent à lui faire avouer qu’il était « pédéraste » (et, bien entendu, à la tête d’un « complot trotskyste » à la tête du NKVD ) et ce depuis son incorporation dans l’armée e n 1917 ! Plusieurs témoignages semblent confirmer l’ homosexualité (au moins intermittente) de Iejov et certains ouvrages d’historiens en Russie y font clairement allusion. Je n’en ai encore trouvé aucun qui explique sa politique et les massacres sanglants qu’il a organisés sur ordre de Staline par cette homosexualité.

Peut-être Mème Vallaud-Belkacem pourrait-elle leur faire la leçon sur les insuffisances criantes de leur méthode de travail historique ?


La prise de la Bastille : le 14 juillet 1785 ou 1793 ?

Ce n’est pas une plaisanterie : plusieurs collègues d’histoire nous ont témoigné avoir reçu le conseil suivant de la part d’un IPR lors de la réunion de la commission d’harmonisation destinée, chacun le sait, à remonter systématiquement les notes jugées trop basses pour augmenter chaque année le nombre de reçus au baccalauréat : « Ne sanctionnez pas une erreur de date de trois ou quatre ans. Cela n’a aucune importance ! «  Il faut juger bonne la date quelque peu approximative.

Donc, si la Première Guerre mondiale passe de 1914-1918 à 1918-1922 et la Seconde de 1939-1945 à 1943-1948, c’est bon, voire excellent. Or un fait est précis. Sa date est un élément constituant fondamental de sa réalité, pour l’individu comme pour la collectivité. C’est ce que nie brutalement le conseil donné ci-dessus aux correcteurs. On avait déjà appris auparavant qu’il ne fallait pas opposer le système de connaissance(s) du professeur à celui de l’élève. Nous voici maintenant dans la dilution des repères temporels.

Il ne manquerait plus, pour compléter le tableau de cette chasse à la connaissance, que la dilution des repères géographiques dans le genre : l’élève qui affirme l’existence d’une frontière commune entre le Sénégal et le Brésil ne saurait être considéré comme commettant une erreur significative, puisque les deux pays sont dans l’hémisphère sud et ne sont séparés que par de l’eau.

Une petite remarque : tous ces braves gens dirigés par Luc Chatel, de l’Oréal, sont de grands partisans de l’« ouverture de l’école sur la vie ». Essayez donc d’appliquer ce laxisme chronologique à votre banque (qui, à un jour près, prélève des agios) ou à l’administration des Impôts (qui, pour un jour de retard, vous taxe de 10 %) … Le résultat est garanti et aucune commission d’harmonisation ne baissera vos agios ou votre amende. La désinvolture officielle dans le traitement des dates même importantes de l’histoire n’est donc pas seulement criminelle du point de vue de la connaissance elle-même, qui exige, dans tous les domaines, la précision, c’est de plus une fort mauvaise introduction à la vie ..  

« Que l’on arrête de vouloir faire croire à nos enfants que nos ancêtres étaient tous des Gaulois » (Jean-François Coppé, Le Monde, 18-19 octobre 2009)

Apparemment, l’avocat d’affaires qu’est le sieur Coppé n’a pas vu un manuel scolaire depuis un demi-siècle … Il y a au moins cinquante ans que l’affirmation qu’ il dénonce en a disparu. Mais on peut être avocat d’affaires, maire, président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, disserter sur l’école et être ignare. C’est peut-être même une condition nécessaire, voire suffisante.