Ce texte de Vladimir Nevski (A), et les documents qui suivent ont été publié dans le CMO n°25, en décembre 2004-janvier 2005, numéro spécial sur la révolution de 1905, que l’on peut télécharger sur le site.
Pour autant que nous puissions en juger d’après les données fragmentaires dont nous disposons (1), le soviet des députés ouvriers d’Odessa fut organisé avec la participation des social-démocrates, du Bund et des S-R. Dès novembre 1905 fut élaboré le » statut du soviet des députés ouvriers de la ville d’Odessa « . Les ouvriers élisaient dans les ateliers un député pour cent personnes ; trois soviets de district furent constitués (celui de Peresyp, celui de la ville et celui de Dalnik). Chaque soviet de district devait élire sa commission exécutive, et les trois commissions constitueraient ensemble la commission exécutive du soviet de la ville. Au cours du mois de novembre eurent lieu, apparemment, deux assemblées générales des députés, avec la présence d’un social-démocrate de Saint-Pétersbourg, S. I. Feinberg, et d’un socialiste-révolutionnaire de Kiev, A.M. Chevtchenko. La première de ces assemblées des députés élus dans les ateliers et les districts eut lieu le 24 novembre 1905 dans le local de la Société des dortoirs à bon marché. Plus de trois cents personnes y participèrent (2). Le menchevik « Friedrich » (pseudonyme), organisateur du district de Peresyp, en assurait la présidence. Les débats portèrent sur les questions suivantes : la situation politique à Saint-Pétersbourg, la collecte de fonds pour les chômeurs pétersbourgeois, l’abolition de la peine de mort et les tribunaux d’exception, la libération des employés arrêtés de la poste et du télégraphe, et la mise en place de la liberté de réunion, d’organisation, de la presse, etc.
L’assemblée ne prit aucune mesure précise. Le 25 novembre, se tint l’assemblée des employés de la municipalité (Zemstvo) dans le local de la direction agricole régionale, semble-t-il, essentiellement sur la question de la grève des employés de la poste et du télégraphe, représentés à la réunion par Ioanno et Hoffmann. Le S-R Chevtchenko et le S-D Feinberg apportèrent des informations sur la situation à Kiev et Novorossiisk, puis on discuta de la grève des chemins de fer du Sud-Ouest (liée au sort de l’ingénieur Sokolov, des chemins de fer de Samara-Zlatooust) et du soutien aux postiers en grève. Il fut alors décidé de remettre aux grévistes 3 % du salaire des employés municipaux, ainsi que 6 000 roubles pris sur les fonds d’assurance de la municipalité. A cette assemblée de la direction agricole, il y avait également des membres du soviet.
L’assemblée constitutive du soviet le 28 novembre
Mais la première séance ouverte du « soviet des députés ouvriers de la ville d’Odessa » fut l’assemblée nombreuse des députés des ateliers qui eut lieu le 28 novembre 1905 à six heures et demie du soir, dans l’auditorium de la ville. Il y avait environ quatre cents députés et représentants des organisations révolutionnaires (à raison de trois par organisation, à l’exception du groupe des anarchistes-communistes). L’ouvrier cheminot Ivan Ananievitch Avdeev fut élu président de séance (Feinberg était déjà reparti d’Odessa).
Ensuite, commencèrent les discours de bienvenue, dont deux furent remarqués : celui du militant socialiste-révolutionnaire Nikolaï (Iossif Nikolaevitch Kossovitch) et celui du représentant du syndicat des personnels médicaux, N. K. Lyssenko, professeur à l’université de Novorossiisk. Puis, l’assemblée discuta du « statut » et l’adopta à l’unanimité, décidant d’ailleurs que les élus au soviet pouvaient être des intellectuels et pas seulement des ouvriers. Après cela, on passa à l’élection des commissions exécutives pour les trois districts. Les élus furent entre autres : Avdeev (le président de l’assemblée), Iosif Abramovitch Batkhan, « Friedrich », « Evguéni », « Martin » (militants des partis).
Les points suivants étaient inscrits à l’ordre du jour : la caisse d’entraide, le journal du soviet des députés ouvriers, la grève politique, le congrès ouvrier, l’armement, la faillite du gouvernement, le chômage, la censure, l’agitation dans les troupes de la garnison d’Odessa. Il ne fut pas possible de traiter toutes ces questions, car les élections s’éternisèrent, et l’assemblée se dispersa en décidant d’envoyer des députés du soviet d’Odessa à celui de Saint-Péterbourg.
Le lendemain, une autre séance fut organisée à la municipalité : les employés écoutèrent le rapport sur l’activité du conseil, exprimèrent leur approbation et promirent leur soutien.
On passa d’abord à la constitution de la commission exécutive ; un ancien étudiant de l’université de Novorossiisk, Varlam Chavli, fut élu président du soviet, assisté de Iossif Abramovitch Vatkhan. D’après les comptes rendus de séance, la commission se mit aussitôt au travail. Jusqu’à l’assemblée générale suivante du soviet, elle siégea presque quotidiennement.
La séance du 30 novembre porta, entre autres, sur la question du journal Les Izvestia du soviet des députés ouvriers de la ville d’Odessa et sur l’organisation d’une commission d’aide aux chômeurs. Comme président de cette commission fut élu le camarade « Dimitri », et, comme secrétaire, le camarade « Mikhaïl ».
La question des chômeurs
La question des chômeurs se reposa à la séance du 2 décembre. Il fut décidé d’obliger la municipalité et le Comité juif à leur verser 50 000 roubles. (Cet argent n’est apparemment jamais parvenu au soviet.) On se pencha également sur le problème de la grève politique. On adopta le principe de la grève immédiate ; comme celle-ci pouvait se transformer en « insurrection populaire, le comité exécutif recommande (a) au soviet des députés ouvriers de s’occuper de l’armement du prolétariat d’Odessa et de récolter l’argent nécessaire pour ce faire« .
La séance du 7 décembre décida, entre autres, en vue des éventuelles arrestations, d’adjoindre un suppléant élu à chaque membre de la commission exécutive. Il fut également décidé d’envoyer un député au congrès des soviets à Saint-Pétersbourg.
Seconde assemblée générale du soviet du 5 décembre
Le 5 décembre fut convoquée une seconde assemblée générale du soviet des députés ouvriers d’Odessa. La question principale discutée à cette séance fut celle de la grève politique générale. Le principe en fut adopté, mais la décision fut remise à la commission exécutive. Parmi les autres points importants, signalons la décision de trouver des moyens pour venir en aide aux chômeurs et les mesures prises pour empêcher un pogrome contre les juifs.
Après la seconde assemblée générale du soviet, la commission exécutive passa à l’application des décisions votées et s’occupa de résoudre les questions urgentes. Parmi les questions secondaires, signalons le rejet de la demande des socialistes-sionistes d’avoir leur représentant au soviet ; le refus était motivé par le fait que les sionistes n’étaient pas un parti socialiste.
Une question importante a dû être tranchée par la commission exécutive sans l’aval du soviet, celle d’envoyer Vassili Lavrentievitch Stepanov au Congrès panrusse des soviets, à Saint-Pétersbourg, car elle avait reçu du soviet de Saint-Pétersbourg une lettre l’invitant à envoyer deux députés au congrès.
La grève générale politique
Le principal problème qu’il fallait résoudre fut celui de la grève générale politique. Les informations données sur le raid du gouvernement contre le soviet de Saint-Pétersbourg imposèrent la décision d’appeler à la grève. La commission exécutive décida donc d’organiser en décembre des meetings dans toutes les usines et les fabriques, d’expliquer le but et le rôle de la grève et de prendre les mesures nécessaires pour appliquer la décision du soviet. Pour diriger la grève, fut élue une commission spéciale comprenant des représentants du POSDR, du Bund et du parti S-R ; à cette commission étaient soumis tous les organes mandatés par les directions des syndicats et des partis pour organiser la grève ; la commission devait éditer les tracts explicatifs. La commission exécutive se prépara fébrilement à la grève : les détachements armés des différents partis furent soumis à un centre unique de combat, on fit une collecte, on établit des liaisons avec les autres villes ; le 9 décembre, un tract appelait à la grève pour le 11 décembre, date où elle commença effectivement ; on avait proposé aux boulangers de rester au travail, et les cochers de fiacre, peu nombreux, pouvaient se joindre ou non à la grève. La commission exécutive se soucia tout particulièrement de la poste et du télégraphe : elle lança un appel aux employés pour qu’ils rejoignent la grève et fit tout son possible pour les entraîner dans le mouvement. Ce qui caractérise le mieux cette grève, ce sont ses modalités, et, à ce sujet, la commission exécutive fit beaucoup d’efforts pour expliquer aux masses quel en était l’enjeu. La question soulevait également le problème de l’armement, de l’abandon du lieu de travail, de l’aide aux chômeurs, etc. Finalement, après des débats prolongés, on décida de donner à la grève un caractère pacifique.
La grève commença, mais il s’avéra bientôt qu’elle était loin d’être générale. Il est vrai que, le 14 décembre, elle fut rejointe par les ouvriers de la station électrique, les comptables et les employés de bureau, les ouvriers du port, etc., mais, comme le montre le n° 3 des Izvestia du soviet des députés ouvriers d’Odessa du 25 décembre 1905, au plus fort de la grève, il fallut employer la force des combattants volontaires pour arrêter les transports ; certaines usines et certains ateliers d’artisans travaillaient également. Il s’avéra bientôt que l’état d’esprit des ouvriers retombait, que la grève pacifique avait épuisé ses capacités et qu’il fallait soit la transformer en insurrection armée, soit la faire cesser. Apparemment, l’état d’esprit à Odessa n’était nullement au combat, et il fallut arrêter la grève le 18 décembre. La commission exécutive formule ainsi son point de vue sur la grève : « Nous avons fait arrêter la grève. Nous avons montré au monde entier notre capacité d’organisation et notre esprit de discipline. Mais nous n’avons pas montré cette fois notre combativité, nous devrons la manifester dans un avenir proche. C’est notre principale tâche, et nous devons lui consacrer toutes nos forces.«
La liquidation du soviet
Malheureusement, le soviet n’en eut pas l’occasion. A Saint-Pétersbourg, aussitôt après la liquidation du soviet local, on se dépêcha de liquider également celui d’Odessa. Le dossier contient des copies des dépêches adressées par le directeur du département de la police d’Odessa aux autorités de la gendarmerie leur enjoignant de faire toute la lumière sur le soviet et d’arrêter ses membres. Les gendarmes d’Odessa eurent beau arguer de la difficulté de la chose, les ordres se firent de plus en plus pressants. Les gendarmes se mirent au travail, et, le 2 janvier, ils avaient déjà arrêté les 15 participants à une réunion dirigée par V. Chavli, apparemment la commission exécutive.
Cinq jours plus tard, lors d’une tentative de réunir l’ assemblée générale du soviet, 18 autres membres furent arrêtés, dont les camarades Batkhan et Stepanov. Avec ces deux arrestations, le soviet d’Odessa fut démantelé.
Ainsi, le soviet d’Odessa dura un peu plus d’un mois (du 28 novembre au 7 janvier) ; il réunira deux assemblées générales (le 28 novembre et le 5 décembre) ; son organe exécutif était une commission exécutive de 15 membres, dont le président était V. Chavli et son adjoint L. A. Batkhan (malheureusement, le dossier ne permet pas de savoir quels étaient les autres membres). La commission exécutive publiera quatre numéros des Izvestia du soviet des députés ouvriers d’Odessa, dont le premier numéro sera imprimé à l’imprimerie des Nouvelles d’Odessa, le numéro 2 dans une autre imprimerie d’Odessa et les numéros 3 et 4, d’après les déclarations des gendarmes, à Kichinev, pour des raisons obscures. Outre ces quatre numéros, le soviet publiera plusieurs proclamations, un appel à la grève générale politique, une proclamation expliquant le but et l’importance de cette grève, et un tract intitulé « Deux boycotts » (un appel au boycott des produits des firmes Popov, Kouznetsov et autres).
Il éditera encore quelque chose, que le dossier ne précise pas. Il appellera à la grève générale politique et enverra un député au congrès des soviets à Moscou (Stepanov).
Beaucoup de questions se posent
En analysant ces matériaux succincts sur le soviet d’Odessa, on s’aperçoit que beaucoup de questions restent en suspens :
1. Comment est né le soviet ?
2. Quelle était la composition de la commission exécutive et du soviet lui-même (3) ?
3. Combien y avait-il de membres (400 ou 200, comme le disent éloquemment les documents) ?
4. Qui a écrit les articles dans les Izvestia ?
5. De quelles sommes disposait le soviet ? (Dans le n° 3 des Izvestia, on cite la somme de 7 217 roubles 92 kopecks.)
6. Le soviet disposait-il de forces armées ?
Toutes ces questions et bien d’autres restent à éclaircir.
Mais ces rares matériaux nous permettent de tirer des conclusions non dépourvues d’intérêt en comparant l’activité du soviet d’Odessa avec, par exemple, ceux de Novorossiisk ou de Rostov. Ce qui frappe d’emblée, ce sont les caractéristiques communes à tous les soviets : la formation spontanée, révolutionnaire, du soviet d’Odessa, et son œuvre révolutionnaire, comme on peut en juger par ses actes :
1. Comme les autres soviets, le soviet d’Odessa organise la taxation des citoyens riches pour organiser l’aide aux chômeurs (comme l’a fait, par exemple, le soviet de Novorossiisk).
2. Il met en place la liberté de la presse, en réquisitionnant les imprimeries légales d’Odessa pour imprimer les deux premiers numéros des Izvestia.
3. Il confisque par la voie révolutionnaire les fonctions du pouvoir, gère les autorisations de lever l’ancre pour les navires, met en place des taxes sur le pain, autorise la reprise du travail dans les usines en faisant verser le profit aux soviets, etc.
4. Enfin, il représente l’expression réelle de la volonté des travailleurs : c’est sous ses ordres que s’arrête ou reprend toute l’activité industrielle et commerciale de la ville.
Ce sont des caractéristiques propres à tous les soviets.
Les faiblesses du soviet d’Odessa
Mais on est en même temps frappé de son manque d’initiative et d’esprit révolutionnaire. Alors que même un soviet comme celui de Novorossiisk organise une milice, confisque l’argent de la Douma, oblige la poste et le télégraphe à faire grève, chasse le gouverneur, prend en main les chemins de fer, etc., le soviet d’Odessa n’a même pas l’idée de désarmer les policiers et les gendarmes, il ne parvient pas à organiser une véritable grève politique totale (la poste et le télégraphe, les cochers ne font pas grève), il n’est même pas capable (ou ne juge pas utile) de fermer ou de saisir le journal des Cent-Noirs (4).
Il ne lui vient pas à l’esprit d’arrêter les Cent-Noirs, comme ce fut le cas, par exemple, à Novorossiisk, ni d’organiser un nouveau tribunal et de chasser l’ancien, comme cela a été fait également à Novorossiisk. Les ouvriers, dont le soviet exprime la volonté, « s’ennuient » sous sa direction, comme le reconnaît son journal les Izvestia, et c’est pourquoi il n’a pas l’occasion non seulement de penser à l’insurrection armée, mais simplement d’aller jusqu’au bout de la grève.
Ces particularités du soviet d’Odessa le distinguent nettement de soviets tels que ceux de Novorossiisk ou de Rostov.
Quelle en est la cause ? Est-ce que le prolétariat d’Odessa s’était lassé des grèves et des luttes incessantes, est-ce que les forces de la réaction étaient trop importantes à Odessa, ou cela vient-il de la composition même du soviet, il ne paraît pas possible de l’expliquer pour le moment.
Les données rapportées ici sur le soviet des députés ouvriers d’Odessa sont tirées du dossier succinct des Archives de l’histoire de la révolution à Petrograd (département spécial, affaire no 38).
Dans ce dossier se trouvent également deux numéros des Izvestia, les n° 1 et 3.
Le premier numéro des Izvestia se présente sur une demi-feuille de journal de grand format, imprimée sur un seul côté. Il n’y a aucune indication sur les auteurs des articles.
Le n° 3 est également imprimé sur un côté d’une demi-feuille de journal, mais de petit format.
Les « statuts » du soviet sont imprimés sur un stencil (in 16°). Il a été fabriqué, apparemment, dans une imprimerie clandestine.
Le tract « Deux boycotts » est une feuille in 8°. Il est indiqué qu’il a été imprimé à 2 000 exemplaires dans une typographie clandestine (celle du comité d’Odessa du POSDR).
(A) Vladimir Nevski était un révolutionnaire, bolchevik ayant pris une part active aux révolutions de 1905 et de 1917. Historien chargé d’écrire une histoire du parti, membre de l’Istpart, il en est mis à l’écart dès 1923. Il est arrêté en 1935 après avoir publié dans la Pravda un article appelé « Le brillant leader », hommage à Lénine, dans lequel il n’est fait aucune mention de Staline, puis fusillé en 1937.
- Archives d’histoire de la révolution. Département spécial, dossier no 38, 1905, « Le soviet des députés ouvriers et son comité exécutif à Odessa ».
- Un document du département des archives d’Odessa mentionne le député de la fonderie L. P. Chifrine, dont les cartes de visite servirent de laissez-passer pour la réunion (dossier n° 38 , feuillet 1).
- Parmi les membres du soviet, citons : M . M. Vilens ki , E. Z. Scheenson, T. T. Kartychov, A. J. Herstein, I. N. Tabatchnikov, L. S. Bronstein, Ch. L. Steinberg, L. M. Rosenfeld, I. M. Neumann, J. L. Schapiro, L. M. Maizel, V. I. Martyntchik, A. I. Babitch, H. P. Schwartzman, F. H. Becker et V. L. Stepanov.
- Organisations monarchistes ultra-réactionnaires, organisatrices de pogromes sanglants.
Documents du soviet d’Odessa
Les statuts du soviet des députés ouvriers d’Odessa
1) Le soviet des députés ouvriers se donne comme tâche de diriger toute la lutte des ouvriers d’Odessa ; il organise les grèves, les syndicats, mène la lutte pour les droits politiques et civiques des ouvriers, etc.
2) Le soviet des députés ouvriers est composé d’ouvriers élus dans toutes les usines, les fabriques et les ateliers d’Odessa.
3) Les élections des députés dans les usines et les fabriques se font par secteurs (sur les anciennes bases). Les petits ateliers d’un secteur se rassemblent et choisissent un député pour 100 ouvriers.
Si le secteur comporte moins de 100 ouvriers, ils élisent quand même un député.
Le soviet des ouvriers est élu par arrondissement (Peresynski, Gorodskoï et Dalnitski). Les soviets d’arrondissement forment ensuite le soviet des députés ouvriers de toute la ville.
4) Chaque soviet d’arrondissement élit une commission exécutive, qui a comme obligation d’exécuter toutes les décisions du soviet des députés ouvriers.
Les commissions exécutives d’arrondissement réunies forment la commission exécutive du soviet de la ville.
5) Le soviet des députés ouvriers se réunit au moins deux fois par mois.
Adopté le 6 novembre 1905
A la suite de l’arrestation des membres du comité exécutif du soviet de Pétersbourg (et en particulier de ses trois coprésidents, Svertchkov, Trotsky et Zlydniev) le 3 décembre, le soviet d’Odessa adopte le 9 décembre l’appel suivant.
Appel à tous les ouvriers et ouvrières de la ville d’Odessa
Le gouvernement autocratique a monté un complot contre le peuple. Il a arrêté le comité exécutif du soviet des députés ouvriers de Pétersbourg, puis le bureau de l’Union paysanne, il a jeté en prison des combattants connus de la liberté du peuple, il a fermé tous les journaux de Pétersbourg qui parlaient ouvertement et directement des besoins du peuple. Avec une froide cruauté, il a jeté à la rue des centaines d’employés de la poste et du télégraphe. Dans les villages et les bourgs, les paysans affamés gémissent sous la nagaïka et sous les verges.
Les membres de la garde et les officiers « fidèles à leur serment » fusillent les matelots insurgés.
A peine remis de sa défaite d’octobre, le gouvernement autocratique recourt à ses moyens extrêmes habituels : il place en état d’exception une province après l’autre et menace de déclarer toute la Russie en état de guerre.
Par toute une série de lois sur la presse, sur les grèves et sur les associations, il retire même les pitoyables libertés reconnues par le Manifeste du 17 octobre.
Il a ruiné complètement la Russie par ses dépenses folles pour la guerre, pour subventionner les gros patrons, les nobles et les hauts fonctionnaires. Pas d’argent, pas de pain.
Les desseins du gouvernement sont clairs : en fermant les journaux de tous les partis révolutionnaires, en extirpant ses chefs des rangs du peuple combattant, il espère convoquer sa Douma d’Etat sous la menace de l’état de guerre et sous la pression de la horde des fonctionnaires et des policiers. Composée de suppôts du gouvernement, docile à ce dernier et à la clique des gros capitalistes et des grands propriétaires terriens, cette Douma d’Etat sera une nouvelle arme pour opprimer et asservir toute la Russie.
Camarades ! La patrie est en danger !
La victoire du gouvernement, c’est la victoire de l’ arbitraire sur la légalité, la victoire de la violence sur le droit, c’est le rétablissement du servage antérieur dans toute sa vigueur, de l’esclavage, contre lesquels le prolétariat et la paysannerie révolutionnaire ont combattu si longtemps et au prix de tant de victimes !
La victoire du peuple révolutionnaire, c’est l’établissement de l’ordre dans lequel toutes les lois seront édictées par le peuple lui-même, dans lequel les représentants librement élus par l’ensemble du peuple défendront les intérêts du peuple, l’instauration de l’ordre dans lequel le prolétariat recevra la possibilité de combattre librement pour un meilleur futur, pour l’émancipation de l’oppression capitaliste, pour le socialisme.
Camarades ! Soyez prêts à vous joindre à la grève générale au premier appel du soviet des députés ouvriers de Pétersbourg et de votre soviet. Que la vie du pays s’arrête, du nord au sud, de Pétersbourg à Kharbine, devant la force du prolétariat organisé, et le gouvernement et ses acolytes trembleront !
Avec la paysannerie révolutionnaire et la partie consciente de l’armée, le prolétariat de Russie engagera le combat décisif contre l’autocratie agonisante.
Camarades ! Il ne peut y avoir qu’une réponse au défi que nous lance l’autocratie impuissante de rage : la victoire ou la mort !
Signé :
Le soviet des députés ouvriers d’Odessa
Le comité unifié du POSDR (1)
Le comité social-démocrate du Bund
Le comité d’Odessa du Parti socialiste-révolutionnaire
Odessa, le 9 décembre 1905
La réunion du comité exécutif du soviet d’Odessa du 18 décembre
Réunis le 18 décembre, nous avons avant tout posé la question : quelles sont les victimes de la dernière grève ? Nous savons bien qu’aucun pas en avant du prolétariat ne peut être effectué sans victimes, que chaque mouvement en avant du peuple russe sur la voie de son émancipation est pavé de victimes. Nous avons commencé à faire le compte des victimes. Des employés et des ouvriers des dépôts de chemin de fer ont été licenciés, les ateliers de l’omnibus ont été fermés et 33 employés transférés dans la réserve, certaines fabriques ont fait grève pour protester contre le refus des patrons de payer les jours de grève, certains députés élus ont été licenciés.
Et nous avons alors été confrontés à la tâche de lutter pour le paiement intégral des jours de grève, pour la réouverture des fabriques lockoutées, pour la réintégration de tous les travailleurs licenciés et le renvoi des jaunes installés à leur place, et à manifester à ceux qui ont souffert un soutien à la mesure de nos forces.