- Lettre du 8 octobre 1923. En annexe à Max Eastman, Since Lenin died, p 142-143.
A l’époque la plus acharnée du communisme de guerre, le système de la nomination des responsables dans le parti n’avait pas le dixième de l’ampleur qu’il a atteinte aujourd’hui. La nomination des secrétaires des comités provinciaux est désormais la règle. Cela donne au secrétaire une position fondamentalement indépendante de l’organisation locale (…).
La XIIème conférence du parti s’était déroulée sous le signe de la démocratie. Nombre des interventions faites alors en faveur de la démocratie ouvrière m’avaient paru exagérées et, une grande partie, démagogiques, étant donné l’impossibilité d’une démocratie ouvrière complète dans un régime de dictature. Mais il était parfaitement clair que le système de pression du communisme de guerre devait laisser place à un système de responsabilité plus vivante et plus large. Mais le régime actuel, qui a commencé à se former avant la XIIème conférence, et qui depuis s’est défini et renforcé est beaucoup plus éloigné de la démocratie ouvrière que le régime de la période la plus acharnée du communisme de guerre.
La bureaucratisation de l’appareil du parti s’est développée dans des proportions inouïes au moyen de méthode de sélection des secrétaires (…). On a ainsi créé une très large couche de permanents qui, en entrant dans l’appareil de direction du parti, renoncent complètement à leurs opinions politiques personnelles ou, du moins, à leur expression ouverte, comme s’ils pensaient que la hiérarchie des secrétaires constitue l’appareil qui crée l’opinion du parti et façonne les décisions.
Sous cette couche de permanents qui renoncent à leurs opinions personnelles se trouve la large masse des adhérents du parti à qui chaque décision apparaît sous la forme d’ordres ou de sommations.
A la base du parti un mécontentement d’une ampleur inhabituelle s’accumule. (…) Ce mécontentement ne se dissipe pas par l’échange ouvert d’opinions dans les réunions du parti et par l’influence que la masse des adhérents du parti devait exercer sur l’organisation du parti lui-même (élection des comités du parti, des secrétaires, etc.) mais elle s’accumule en secret et mène à des tensions intérieures.
LA REPONSE DU BUREAU POLITIQUE
« Nous jugeons nécessaires de dire franchement au parti que le mécontentement du camarade Trotsky, toute son irritation, toutes ses attaques contre le Comité central, qui durent sans interruption depuis des années, sa volonté de semer le trouble dans le parti, reposent sur le fait que Trotsky désire que le Comité central le place, lui et le camarade Kalegaev, à la tête de l’économie du pays. »