La bureaucratisation à pas de géant : en 1927, un membre sur deux du parti communiste soviétique est un permanent !

Jean-Jacques Marie

Article publié dans les Cahiers numéro 81

Le XVe Congrès du parti communiste de l’URSS, qui se tient en décembre 1927, marque la défaite de l’Opposition unifiée qui va se traduire par l’envoi en exil de plusieurs milliers de « bolcheviks-léninistes » (trotskystes).

Ce congrès a débouché aussi sur la publication d’un document d’un très grand intérêt, guère utilisé par les historiens, le recensement des adhérents du parti et leur répartition professionnelle et sociale.

Ce recensement donne de la bureaucratisation du parti une image très éclairante. D’après les chiffres officiels publiés dans un document intitulé Composition du parti communiste (bolchevique), au recensement publié en 1927, 438 832 adhérents du parti appartenaient aux organismes dirigeants du parti, de l’Etat et des syndicats à tous les niveaux, depuis le niveau central jusqu’à celui des régions et des localités d’une certaine importance.

Le parti communiste comptait donc dans ses rangs 438 832 permanents, attachés au maintien dans leur poste qui leur permettait d’échapper au travail en usine, de ne pas trop se fatiguer, de bénéficier de certains avantages matériels et dont ils savaient qu’ils perdraient ledit poste et les avantages qui lui étaient liés à la moindre manifestation oppositionnelle, voire simplement critique. Pour saisir l’ampleur du phénomène, il faut rapporter ce chiffre à celui du nombre des adhérents du parti : 887 000 membres… dont un sur deux est donc un permanent !

On le devine, la défaite de l’opposition n’est pas le fruit d’un affrontement idéologique !