Paru le 10 novembre 2020, dans la collection « Chroniques » des éditions Vendémiaire.
« L’existence avait pris un sens supérieur » écrit le dissident soviétique André Siniavski. « De nouvelles voies s’ouvraient, menant à l’administration, au savoir, à la création (…) au formidable éveil des énergies créatrices populaires qui, se manifestant de toutes les manières, dessinaient le panorama de l’utopie réalisée. Berger hier, aujourd’hui à la tête d’un régiment ou d’une armée ».
Pourtant, dès le 20 décembre 1917, la poétesse Zinaïda Hippius notait : « La famine absolue frappe à nos portes ». Peu avant de mourir Lénine écrivait : « Nous sommes des mendiants. Des mendiants affamés et ruinés ».
Guerre civile, heurts avec la paysannerie, ravages de la dysenterie, du choléra et du typhus, dislocation de l’industrie et des transports, ravages de la faim, voire de la famine, complots démantelés par la Tcheka ou parfois imaginaires dessinent le cadre d’une dure existence au quotidien dans des logements partagés, non chauffés l’hiver, où beaucoup, pour survivre, se livrent au plaisir risqué du marché noir, où certains, rescapés du tsarisme, se réfugient dans l’espoir de la victoire des Blancs alors que des dizaines de milliers de prolétaires et de jeunes se battent et se débattent dans l’attente impatiente de la révolution mondiale qui leur garantirait la promesse, parfois à l’allure improbable, de la victoire.