Tract des Merjaiontsy

Tract imprimé

Comité inter-rayon du RSDRP de Saint-Pétersbourg consacré à la Journée internationale de l’ouvrière du 23 février

Camarades ouvrières,

C’est la dixième année que les femmes de tous les pays cé­lèbrent le 23 février, comme la journée ouvrière des femmes, le « 1er mai » des femmes. Les Américaines ont été les premières à faire de ce jour ce­lui où elles manifestent leurs forces, et, peu à peu, les femmes du monde entier les ont rejointes. Ce jour-là, il y a des réunions et des meetings pour expliquer les raisons de notre dure situation et chercher une issue. Depuis longtemps la faim pousse les femmes à l’usine, depuis longtemps des millions de femmes sont, comme les hommes, devant les machines. Nous ver­sons notre sueur pour les patrons comme nos camarades hommes, comme eux on nous emprisonne pour avoir fait grève, comme eux nous devons lutter. Mais c’est récemment que les femmes ont rejoint la famille ouvrière, souvent elles ont encore peur, elle ne savent pas comment et quoi revendiquer. Les patrons ont profité et profitent de leur ignorance et de leur ti­midité. En ce jour, camarades, réfléchis­sons à la façon de vaincre au plus tôt notre ennemi, le capitaliste. Souvenons-nous de nos proches au front, souvenons-nous de la dure lutte par laquelle ils ont arraché aux patrons la moindre augmentation, chaque heure de repos, au gouvernement chaque liberté. Combien d’entre eux sont morts au front, en prison et en exil pour prix de leur combat. Vous les avez remplacés à l’arrière, votre devoir est de poursuivre leur œuvre. Leur œuvre pour libérer toute l’humanité de l’exploitation et de l’esclavage. Et vous ne devez pas, camarades femmes, retenir les hommes restés à l’usine, mais vous joindre à eux dans la lutte fraternelle contre le gouver­nement et les patrons, au profit de qui se mène la guerre qui a fait couler dans tous les pays tant de sang et de larmes. C’est la troisième année que s’éternise cette guerre terrible. Nos pères, nos maris, nos frères périssent. Nos proches reviennent malheureux et invalides. Le gouvernement du tsar les a envoyés au front, les a tués, blessés et ne se soucie pas de les nourrir. Il n’a cessé de verser le sang ou­vrier. Il a fusillé les ouvriers le 9 janvier, le 4 avril pendant la grève sur la Léna, en­core récemment à Ivanovo-Vosnessensk, Chouia, Gorlovka et Kostroma. Le sang ouvrier coule sur tous les fronts, la tsarine fait commerce du sang du peuple et vend la Russie à l’encan. On envoie les soldats sous la fusillade, presque sans armes, à une mort certaine.

Et à l’arrière, les fabricants, sous le prétexte de la guerre, voudraient faire des ouvriers leurs esclaves. Dans toutes les villes, tout augmente terriblement, la faim frappe à chaque porte. A la campagne on rafle le dernier épi et le bétail pour la guerre. Nous faisons la queue pendant des heures. Nos enfants ont faim. Combien sont livrés à eux-mêmes, ont perdu leurs parents. Ils deviennent des sauvageons, des voyous. La faim pousse des filles, des enfants encore, sur le trottoir. Com­bien d’enfants travaillent au-delà de leurs forces sur des machines, du matin au soir. Partout le chagrin et les larmes. Et pas seulement en Russie, dans tous les pays les travailleurs souffrent. Récemment le gouvernement allemand a férocement réprimé une émeute de la faim à Berlin.

En France la police se déchaîne et les grévistes sont envoyés au front. Partout la guerre sème le malheur, la cherté de la vie, l’oppression de la classe ouvrière. Camarades ouvrières, pourquoi ? Pourquoi se mène cette guerre ? Avons-nous besoin de tuer des millions d’ouvriers et de paysans allemands et autrichiens ? Les ouvriers allemands, eux non plus, ne veulent pas se battre. Ce n’est pas volontairement que les nôtres partent au front, ils y sont forcés. Ce n’est pas volontairement que partent les ouvriers autrichiens, anglais, allemands. Partout on pleure à leur départ, comme ici. C’est pour l’or qui brille dans les yeux des capitalistes, pour leur profit que la guerre se mène. Les ministres, les industriels, les banquiers espèrent pêcher en eau trouble, ils s’engraissent en temps de guerre et les ouvriers et paysans font tous les sacrifices, payent pour tout.

Chères camarades femmes, allons-nous longtemps encore supporter en silence en nous défoulant de temps en temps sur les petits commerçants ? Ils ne sont pas res­ponsables des malheurs du peuple, eux- mêmes sont ruinés. C’est le gouvernement qui est coupable, il a commencé la guerre et ne peut la finir. Il ruine le pays. C’est à cause de lui que vous êtes affamées. Les capitalistes sont coupables, c’est pour leur profit que la guerre se mène. Il est plus que temps de leur crier : Assez ! A bas le gou­vernement criminel et toute sa bande de pilleurs et d’assassins. Vive la paix !

L’heure du châtiment a sonné. Depuis longtemps nous ne croyons plus aux fables des ministres et des patrons. Dans tous les pays, la colère populaire monte. Partout les ouvriers commencent à comprendre que ce n’est pas de leurs gouvernements qu’il faut attendre la fin de la guerre. Et s’ils signent un traité de paix, ils s’efforceront d’accaparer des terres étrangères, de piller d’autres pays et cela mènera à de nouvelles guerres. Les ouvriers n’ont pas besoin du bien des autres.

A bas l’autocratie !

Vive la révolution !

Vive le gouvernement révolutionnaire provisoire !

A bas la guerre !

Vive la République démocratique ! Vive la solidarité internationale du prolétariat !

Vive le POSDR uni !

1917, Comité des Mejraiontsy de Petersbourg

GARF fonds 1741. inventaire 1. dossier 36027 publ. Révolution prolétarienne 1923 T. I (13) pp. 282-284.

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« L’égalité de la femme ».

Carte de Petoukhov, Petrograd, 1917